Bridge, le pont qui manquait aux stablecoins

Un pont fait de stablecoin • Qant, M. de R. avec Midjourney

Le rachat de la start-up Bridge permettra à Stripe d’être prête aussi bien pour le déploiement des monnaies numériques de banque centrale que des stablecoins. Voire de construire un nouveau “rail” de paiements internationaux.

Créée en 2022, Bridge a levé 58 millions de dollars en août avant de se vendre à Stripe, avant-hier, pour 1,1 milliard de dollars (environ 1 Md€, lire Qant du 22 octobre). Ce rachat, qui reste soumis à l'approbation des autorités, marque une étape importante pour Stripe, surtout connue comme un des leaders des paiements B2B sur Internet, avec 21 % des parts de marché face à Paypal et Square, plus tournés vers le B2C. Parmi ses 21 000 clients, on compte Amazon, Apple, Google, Wal-Mart et, en France, CDiscount.

La texane Bridge, bien moins connue, a été fondée par deux anciens employés de Square et Coinbase, Zach Abrams et Sean Yu, avec pour objectif de faciliter les paiements internationaux via des solutions basées sur les stablecoins. Plus précisément, ses API lancées en 2023 proposent des “rampes” qui facilitent les conversions entre monnaie bancaire et stablecoins, tout en assurant un transfert rapide et sécurisé entre différentes blockchains.

L’objectif affiché de Bridge était d’utiliser les stablecoins comme un nouveau “rail de paiement international”, en alternative aux systèmes traditionnels, comme Swift, jugés lents et coûteux. Pour ce faire, la start-up a obtenu des licences pour opérer aux États-Unis et en Europe et en août dernier, les transferts internationaux de ses clients, notamment SpaceX et Coinbase, ont dépassé les 5 milliards de dollars.

Acheter un objectif

Pour Stripe, l’acquisition de Bridge renforce tout d’abord sa présence dans l'univers des cryptos. Après avoir interrompu son support pour les paiements en bitcoin en 2018, en raison de l'instabilité des prix et des coûts de transaction, Stripe a introduit cette année la possibilité pour ses utilisateurs de payer avec le stablecoin réglementé USDC. Elle s’appuie pour cela sur les services de Paxos (lire Qant du 29 avril).

La solution de Bridge, toutefois, est “stablecoin-agnostic”: le client peut choisir le jeton et la blockchain qui lui conviennent le mieux. Demain, elle pourra sans doute tout aussi bien accueillir des monnaies numériques de banque centrale (CBDC). Mais d’ici là, Stripe peut parier sur la croissance continue de l’utilisation des fonctionnalités de monnaie numérique par les groupes internationaux, qui sont souvent déjà ses clients pour leurs activités sur Internet.

L’intérêt croissant pour les stablecoins, dont la capitalisation a dépassé les 175 milliards de dollars, dépasse en effet les cryptos. Tout en offrant la stabilité et le sous-jacent d’un fonds monétaire, ils peuvent offrir les avantages d’une monnaie numérique et programmable. Bridge pourra donc permettre à Stripe de construire une solution de paiement transfrontalier qui combine la rapidité des transactions sur une blockchain avec la stabilité des monnaies fiduciaires.

Sans surprise, le monde crypto voit bien plus loin. On y parle de micropaiements ou de monnaies virtuelles dédiées aux agents d’IA. Et, bien sûr, de solutions de paiement rapides et peu coûteuses pour les pays émergents ou les régions sous-bancarisées.

Dans l’immédiat, 1,1 milliard de dollars pour construire un nouveau “rail” international de paiements, ce n’est pas cher payé.

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