Des robotaxis pour les JO de Los Angeles

Paul Miller • © Forrester Research

Paul Miller, vice-président et analyste principal chez Forrester Research, poursuit son analyse des conditions du déploiement progressif des robotaxis, porté par Waymo, Uber et les projets d’Elon Musk.

Elon Musk a l'habitude de faire des promesses ambitieuses. En 2013, il a déclaré que les voitures auto-conduites seraient disponibles dans les trois ans. Mais il est également connu pour son implication dans la réalisation d'innovations techniques remarquables chez Tesla (voitures et batteries), SpaceX et Starlink.

Il est très difficile de créer un véhicule autonome capable de rouler sur n'importe quelle route, dans n'importe quelles conditions. Les robots taxis de Baidu, Cruise, Waymo et d'autres opèrent dans des zones géographiques spécifiques, comme le centre de San Francisco en Californie ou Wuhan en Chine. Certains d'entre eux ont encore besoin de conducteurs de sécurité humains dans la voiture, en particulier lorsqu'ils commencent à conduire dans une nouvelle zone.

La nécessité de convaincre

Ces entreprises doivent construire ou modifier une voiture techniquement capable d'observer et de réagir à l'environnement qu'elle traverse. Elles doivent ensuite prouver qu'elles peuvent rouler en toute sécurité dans une ville donnée et en persuader les autorités de réglementation compétentes. Ces régulateurs accordent l'autorisation d'opérer dans une zone spécifique (l'État de Californie a accordé à Cruise et Waymo l'autorisation d'opérer dans le centre de San Francisco, par exemple). Nombre d'entre elles ont des restrictions quant aux conditions de conduite, ce qui peut les empêcher de circuler la nuit ou par forte pluie ou neige, par exemple.

Une entreprise qui souhaite opérer au niveau national ou international doit actuellement convaincre un très grand nombre d'organismes de réglementation, ce qui est lent et coûteux.

Tesla a quelques atouts en sa faveur. L'entreprise sait déjà comment construire des voitures à grande échelle. Elle sait intégrer les logiciels et le matériel dans la voiture. Elle dispose de l'un des meilleurs réseaux de recharge pour véhicules électriques. Enfin, elle peut utiliser des millions de trajets dans ses voitures pour former ses systèmes de conduite autonome à l'aide d'observations du monde réel.

Des défis à la chaîne

Cependant, Tesla est confronté aux mêmes défis que n'importe quel concurrent lorsqu'il s'agit d'exploiter une flotte. Qu’elle soit régionale, nationale ou internationale, il faut persuader les autorités de réglementation et le public de la sécurité, surmonter les objections des chauffeurs de taxi et de leurs partisans, et gérer le travail logistique de recharge et d'entretien d'une flotte entière de robotaxis : qui nettoie, lorsque le passager avant vous laisse de la nourriture – ou pire – dans la voiture ?

Il est réaliste de penser que les taxis autonomes finiront par remplacer les taxis à conducteur humain, du moins dans les villes. Les routes urbaines sont raisonnablement bien entretenues, très bien cartographiées, et elles ont des limites claires et des marquages de voies que les caméras de la voiture peuvent voir. Il y a suffisamment de passagers potentiels pour créer une entreprise viable, les distances sont suffisamment courtes pour que la recharge ne soit pas un problème important, et un taxi sans chauffeur humain devrait être moins cher à exploiter (et à louer) que son équivalent avec chauffeur humain (sauf dans certaines économies émergentes, peut-être).

Il est moins évident que les taxis autonomes seront fiables sur les routes de campagne, qui peuvent être dépourvues de marquage au sol ou avoir des bords mal définis. Si la voiture ne peut pas compter sur ces signaux clairs, elle doit utiliser davantage de capteurs et de puissance de calcul pour comprendre où elle se trouve et où elle va, ce qui augmente les coûts.

Le mythe des JOs

Les derniers Jeux Olympiques de Paris devaient nous offrir des taxis volants. Les taxis volants étaient là, à Versailles et sur la Seine, mais ils n'ont pas transporté de passagers pendant l'événement. Même lorsqu'ils seront opérationnels, il est peu probable que ces véhicules volants constituent une véritable alternative aux taxis terrestres pour la plupart des gens : ils seront trop chers et les itinéraires qu'ils pourront emprunter seront trop limités. Les taxis autonomes, les minibus et peut-être même les autocars devraient être une proposition réaliste pour Los Angeles dans quatre ans, surtout s'ils peuvent passer une grande partie de leur temps à rouler le long d'itinéraires dédiés (ou au moins bien cartographiés). Un bus autonome (avec deux chauffeurs de sécurité) transporte déjà des passagers payants dans la ville écossaise d'Édimbourg, et VW testera un minibus autonome sur les routes de Hambourg cette année. Si les régulateurs, les autorités municipales et les fournisseurs de technologie sont suffisamment motivés pour que cela fonctionne, les conditions sont réunies pour que les Jeux de Los Angeles soient une réussite.

Lire la première partie de l’analyse.

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